Les fibres alimentaires et leurs rôles dans le maintien de la santé.

Les fibres alimentaires et leurs rôles dans le maintien de la santé.

Par Jacqueline Lagacé, Ph.D.

 Les fibres alimentaires, définition et classification

 Les fibres alimentaires constituent les éléments structuraux des végétaux que l’on peut qualifier de squelette (externe et/ou interne).  On trouve des fibres alimentaires dans les fruits, les légumes, les légumineuses et les graines oléagineuses.  Les fibres alimentaires résistent à l’hydrolyse (digestion) effectuée par les enzymes digestives de l’homme et pour cette raison ne sont pas absorbées au niveau du grêle (petit intestin). Ces fibres qui sont non digérées lorsqu’elles circulent dans l’intestin grêle, sont soumises à leur arrivée dans le colon à un processus de fermentation partielle ou complète qui aboutit à la libération d’acides gras à chaînes courtes qui jouent un rôle important dans l’homéostasie (équilibre) de l’organisme (1).

 es fibres alimentaires sont classées en deux grands groupes: les fibres solubles (solubles dans l’eau) et les fibres insolubles (2). Il faut savoir que les végétaux pourvus en fibres alimentaires contiennent à la fois des fibres solubles et insolubles.  Par exemple, les pommes contiennent des fibres solubles sous forme de pectine dont 15% se trouve dans la pelure et le reste dans la chair du fruit.  Elles contiennent également des fibres insolubles sous forme de cellulose, un constituant important de la pelure. Les graines de lin pour leur part contiennent des quantités équivalentes de fibres solubles et insolubles.

 On trouve des fibres solubles hautement fermentables dans les aliments suivants : légumineuses, noix, différentes graines (lin, chia, chanvre), fruits (poires, pêches, agrumes, pruneaux, fraises, bananes fermes, etc.), légumes (oignons, ail, artichauts, asperges, carottes, haricots, pois verts, choux de Bruxelles, pommes de terre, patates douces, courgettes et courges), céréales (sarrasin, millet, etc.) amidons résistants à la digestion (gomme de guar, inuline).

 Les fibres insolubles sont soit à fermentation lente ou non fermentables au niveau du colon.  On trouve des fibres insolubles à fermentation lente dans les céréales et pâtes faites de grains entiers, les fruits, les légumes et les graines de lin.  Les fibres insolubles et non fermentables se trouvent dans la peau des fruits et des légumes (cellulose, hémicellulose), les graines et céréales fortement fibreuses et les noix (lignine).

Comment les fibres alimentaires affectent-t-elles la fonction gastro-intestinale?

Les fibres alimentaires jouent un rôle majeur dans le fonctionnement gastro-intestinal en augmentant le volume des selles ce qui améliore le transit intestinal.  Les glucides, non digérés mais fermentables de ces fibres alimentaires lorsque ces dernières atteignent le colon, sont fermentés (partiellement ou totalement) par les bactéries de la flore intestinale (microbiome).  La fermentation de ces glucides entraîne la production d’acides gras à courtes chaines.  Les acides gras à courtes chaînes, créent une charge osmotique, ce qui favorise leur absorption et leur métabolisation par les cellules du colon, celles du foie et celles des tissus périphériques (3-5). La fermentation des fibres alimentaires influence directement la formation des matières fécales via la rétention d’eau qu’elles entraînent. La fermentation agit également de façon indirecte sur la flore intestinale du colon en stimulant sa croissance et de là, la biomasse microbienne.  C’est pourquoi, les différents types de fibres consommés influencent fortement la composition du microbiome du colon (6).

 Plus les fibres alimentaires sont insolubles, plus leur effet laxatif et la vitesse du transit intestinal sont augmentés alors que les fibres solubles ont généralement un effet laxatif plus doux, tout en influençant peu ou pas la vitesse du transit intestinal.  Les fibres solubles influenceraient à la hausse et possiblement de façon sélective la croissance de certaines bactéries saprophytes (bonnes bactéries) alors que les fibres insolubles influenceraient de façon globale la croissance bactérienne.  La fermentation des fibres alimentaires peut provoquer chez certaines personnes des effets secondaires indésirables, soit la production de plusieurs gaz, tels le dioxyde de carbone, l’hydrogène et le méthane. Ces gaz sont souvent malodorants et peuvent provoquer de l’inconfort sous forme de ballonnements et de flatulences chez les individus sensibles.  Ces désagréments affectent particulièrement les personnes qui souffrent de problèmes gastro-intestinaux (2). Lorsque la fermentation est pratiquement inexistante (ex. cellulose), il y a moins de formation de gaz.  Pour cette raison, la consommation de fibre non fermentable peut parfois aider à traiter la constipation chez les personnes qui souffrent du syndrome du colon irritable (2).

Les bénéfices potentiels des fibres alimentaires pour la santé dépendent des caractéristiques suivantes: plus les fibres sont hydrosolubles, plus elles ralentissent les taux d’absorption du glucose et des lipides à partir du petit intestin grêle, ce qui serait bénéfique puisque cela permettrait de diminuer le cholestérol sanguin et particulièrement le taux de LDL (low density lipoproteins ou mauvais cholestérol (2).  D’autre part, les fibres insolubles, favorisent la quantité d’eau présente dans les matières fécales ce qui accélère la vitesse de transit du colon, incluant celle du péristaltisme (mouvement de l’intestin vers la sortie). Lorsque le transit intestinal est accéléré dû à la présence de fibres insolubles, cela aurait un effet anti-inflammatoire (7).

 L’importance des acides gras à chaînes courtes sur la santé

 Les acides gras à chaînes courtes, issus de la fermentation des fibres alimentaires, exerceraient un effet calmant sur l’ensemble du système gastro-intestinal y compris la partie proximale de l’estomac, ce qui pourrait avoir un effet bénéfique sur les symptômes du reflux gastro-esophagien.  De plus, les acides gras à chaînes courtes influenceraient le profil du microbiome intestinal en favorisant la croissance des bactéries bénéfiques.  Par exemple, les glucides tels l’inuline (présente dans: ail, poireau, oignon, asperge, artichaut) sont considérés comme des prébiotiques qui peuvent stimuler la croissance d’espèces bactériennes favorables à la santé, qui résident déjà dans le colon tels les lactobacilles et les bifidobactéries (6, 8), ce qui peut aider les personnes qui souffrent du syndrome du colon irritable (9).

 Les fibres alimentaires: les recommandations des autorités en santé

 Toutes les recommandations récentes émanant des Autorités en santé américaines (10-12), Européennes (EFSA) (13,14), mondiales (WHO) (15), et The World Cancer Research Fund (16), concluent que la consommation de fibres alimentaires est associée à une baisse du risque de développer des maladies chroniques ainsi que des problèmes métaboliques.  Ces Associations concluent que les fibres alimentaires, en plus d’influencer positivement la digestion et l’absorption des aliments dans le tractus gastro-intestinal, peuvent également favoriser des taux normaux de glucose sanguin, d’insuline, de lipides, de cholestérol, procurer une sensation de satiété, favoriser la balance énergétique, la composition de la microflore intestinale ainsi que le devenir des produits de dégradation. Pour sa part, L’EFSA recommande la consommation de 25 g par jour de fibres alimentaires pour un fonctionnement adéquat de l’intestin chez l’adulte.  Cet organisme  ajoute en complément, que la consommation de fibres alimentaires a des effets favorables sur la pression sanguine, le poids corporel et un risque réduit de développer un cancer colorectal ou un diabète de type 2.  Par contre, le « Rome Foundation Working Group » (2013), admet que l’efficacité des fibres alimentaires pour améliorer les fonctionnalités lors de maladies intestinales est limitée et que même l’utilisation judicieuse des fibres peut exacerber le gonflement abdominal, les flatulences, la constipation et la diarrhée.

 En conclusion, si on se base sur les résultats des travaux du Dr Jean Seignalet et sur les nombreux témoignages reçus (jacquelinelagace.net), le régime hypotoxique peut constituer une solution efficace pour les gens atteints de maladies intestinales chroniques. En effet, les règles alimentaires du régime hypotoxique développé par le Dr Seignalet montrent une efficacité indéniable à mettre en rémission des maladies intestinales telles le syndrome de l’intestin irritable, la colite, la maladie de Crohn, la maladie coeliaque et le reflux oesophagien, ces maladies faisant partie intégrante de la centaine de maladies d’inflammation chronique susceptibles de répondre positivement à la diète hypotoxique.

Bibliographie

 1.  Dhingra D, Michael M, Rajput H, Patil RT, “Dietary fibre in foods: a review”, J Food Sci Techno, Vol. 49, P. 255-266, 2012.

2.  Eswaran S, Muir J, Chey WD, “ Fiber and functional gastrointestinal disorders”, Am J Gastroenterol, Vol. 108, p. 718-727, 2013. Review.

3.   Todesco T, Rao AV, Bosello O et al. « Propionate lowers blood glucose and alters lipid metabolism in healthy subjects”,  Am J Clin Nutr , Vol. 54, p. 860-865, 1991.

4   Topping DL, Clifton PM, “ Short-chain fatty acids and human colonic function: roles of resistant starch and nonstarch polysaccharides”,  Physiol Rev, Vol. 81, p. 1031-1064, 2001.

5.  Wong JM, de Souza R, Kendall CW et al.,” Colonic health: fermentation and short chain fatty acids”,   J Clin Gastroenterol, Vol. 40, p. 235-243, 2006

6.  Slavin J, “Fiber and prebiotics: mechanisms and health benefits Nutrients”, Vol. 22, p. 1417-1435,  2013.

7. Kovarik JJ, Hölzl MA, Hofer J et al., “Eicosanoid modulation by the short-chain fatty acid n-butyrate in human monocytes”,  Immunolog, Vol. 139, p. 395-405, 2013.

8.    Roberfroid MB, Van Loo JA, Gibson GR,  “ The bifidogenic nature of chicory inulin and its hydrolysis products”,  J Nutr, Vol. 128, p. 11–19, 1998. 

9.  Piche T, des Varannes SB, Sacher-Huvelin S et al. « Colonic fermentation influences lower esophageal sphincter function in gastroesophageal reflux disease”, Gastroenterology, Vol. 124, p. 894–902, 2003.

10. USDA Center for Nutrition Policy and Promotion. Alexandria, VA: 2010. USDA’s Nutrition Evidence Library (NEL) http://www.nutritionevidencelibrary.com [cited 16 November 2011].

11. Dietary Guidelines Advisory Committee. Washington, DC: US Department of Agriculture, Agriculture Research Service; 2010. Carbohydrates. Report of the Dietary Guidelines Advisory Committee on the Dietary Guidelines for Americans.

 12.   Department of Agriculture DoHaHS. 7th edition. Washington, DC: US Government Printing Office; 2010. Dietary guidelines for Americans.

 13.  European Food Safety Authority. Scientific opinion on dietary reference values for carbohydrates and dietary fibre. EFSA Journal. 2010;8(3):1462.

 14. Overby NC, Sonestedt E, Laaksonen DE, Birgisdottir BE,  “Dietary fiber and the glycemic index: a background paper for the Nordic Nutrition Recommendations 2012”,     Food Nutr Res,  2013;57. doi: 10.3402/fnr.v57i0.20709. Epub 2013 Mar 25.

15. Mann J, Cummings JH, Englyst HN et al.,  “FAO/WHO scientific update on carbohydrates in human nutrition: conclusions”,  Eur J Clin Nut, Vol. 61(Suppl. 1):S132–137, 2007.

 16. World Cancer Research Fund, American Institute for Cancer Research. Washington, DC: AICR; 2007. Food, nutrition, physical activity and the prevention of cancer: a global perspective. Washington, DC: AICR.

 

 

7 Commentaires

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7 réponses à “Les fibres alimentaires et leurs rôles dans le maintien de la santé.

  1. claudine racine

    Bonjour Madame,

    Je lis votre dernier livre (difficile à mon niveau) et je suis scrupuleusement la diète hypotoxique depuis à peine deux semaines.
    Entre autres problèmes, je souffre du colon irritable.

    Je suis, depuis longtemps, un régime sans fibres insolubles, avec une consommation journalière d’ananas (ça marche, bien qu’il soit fibreux). C’est grâce à cette diète que j’ai réussi à limiter les périodes d’inconfort en fréquence et en durée, mon expérience m’en convainc.
    Mais il me semble dommage de supprimer de mon alimentation tous ces produits, aussi bien pour leur saveur que pour l’équilibre de mon microbiote (adieu crudités type racines, fruits à pépins, laitues et autres salades etc etc…). Et puis ma consommation journalière d’ananas frais est peut être excessive au niveau de la santé…

    J’aimerais aussi me libérer de mon syndrôme des jambes sans repos, et pourquoi pas, être soulagée de ma vessie hyperactive…
    Bref, je suis très motivée pour suivre la diète que vous conseillez.

    Cela m’aiderait beaucoup, et m’encouragerait, si vous pouviez répondre à toutes ces questions …

    1/ Comment expliquez vous que l’ananas m’aide à gérer mes crises (c’est une aide un peu violente parfois)?
    L’ananas a la capacité de réduire l’œdème et il est anti-inflammatoire

    2/ La diète sans fibres insolubles que j’ai suivie jusqu’à présent, n’est elle pas très proche de la diète FODMAP dont vous exposez les faiblesses?
    Je recommencerais doucement à introduire des fibres solubles et soyez attentive à vos réactions.

    3/ Ai-je bien compris, si je dis que ce serait le déséquilibre de mon microbiote (à cause, en grande partie, des produits laitiers et du gluten) qui aurait créé une inflammation de ma paroi intestinale, donc son incapacité à gérer les fibres insolubles? (pardonnez-moi si mon analyse est très schématisée et très vulgarisée)
    Vous avez raison car la consommation d’aliments pro-inflammatoires chez des personnes sensibles déséquilibre le microbiome intestinal avec plusieurs conséquences négatives.

    4/ Donc puis-je espérer que, si mon microbiote est rééquilibré grâce à la diète hypotoxique, cela diminuera l’inflammation de mon intestin et que je pourrai à nouveau consommer des fibres insolubles? Puis je refaire quelques essais, ou dois-je attendre au moins trois mois avant de les réintroduire dans mon alimentation?
    Vous avez raison.

    Je vous remercie Madame d’avoir eu la patience de me lire, et d’avance, recevez toute ma reconnaissance.

    Claudine Racine

  2. Pingback: Astuces et conseils pour un microbiote intestinal en santé - Association Manger Santé Bio

  3. Marie-Claude

    Bonjour! Tout en lisant votre dernier livre et les commentaire sur ce site, je me rends compte que cette façon de s’alimenter pourrait grandement m’aider. Par contre, j’ai des interrogations. Moi je souffre du colon irritable. En lisant l’article sur les fibres, j’ai l’impression que ce régime aide à combattre la constipation. Moi mon problème c’est le contraire, quand mon colon ne va pas bien c’est de la diarrhée que j’ai, pas de la constipation. J’ai des gros mal de ventre, j’ai chaud et parfois j’ai des diarrhée très liquide. J’ai l’impression dans mon cas que les fibres ne m’aident pas du tout. Quand je mange trop de fibres ou trop de noix, c’est là que j’ai des problèmes avec mon colon irritable. Est-ce parce que je ne mange pas les bonnes fibres ou je les mange pas de la bonne façon ? Merci à l’avance pour votre réponse.

    • Jacqueline

      Votre corps si vous l’écoutez vous donne les bonnes réponses. Si vous lisez attentivement mon article sur les fibres, il est clairement dit que les fibres ne conviennent pas nécessairement à tous, particulièrement à certains qui souffrent du colon irritable. Tenez compte des réactions de votre corps et votre santé va s’améliorer.

  4. Lazar

    Le mot merci ne suffirera pas pour tout ce que vous faites pour l humanite’.

  5. Francine Morin

    Bonjour Madame Lagac ,

    Vous tes formidable de nous donner tous ces renseignements,a m’aide normment car je travaille trs fort comprendre tout a pour amliorer ma sant .C’est dj mieux avec la lecture de vos deux livres que j’essaie de suivre avec confiance , je vais mieux mais je veux faire davantage attention .J’ai de l’arthrose aux mains. Merci beaucoup ! Francine Morin

  6. Anne-Marie Gill

    Merci pour ce concentré de renseignements. Je suis le régime depuis 7 semaines et j’ai des problèmes de colon irritable, je pourrai donc en faire bon usage!

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